C’est la première étude à avoir regardé si les médecins ont un taux de divorce supérieur ou non, par rapport aux autres professions de santé ou à d’autres professions sans rapport avec la santé, comme les avocats, par exemple. Les conclusions, présentées dans le British Medical Journal et commentées dans la même revue par un médecin britannique, répondent non seulement à la question, mais révèlent que les médecins femmes ont un risque accru par rapport à leurs homologues masculins.
Les chercheurs du Massachusetts General Hospital (Boston), de l'University of Southern California (Los Angeles), de la Harvard Medical School et de Cambridge ont regardé la prévalence et l'incidence du divorce chez les médecins américains par rapport à d'autres professionnels de la santé, des avocats et des professionnels hors secteur santé, puis ont analysé les facteurs associés au divorce chez les médecins. Au total, leur analyse a porté sur les données de 48.881 médecins, 10.086 dentistes, 13.883 pharmaciens, 159.044 infirmières, 18.920 cadres de santé, 59.284 avocats et plus de 6 millions d'autres « professionnels » hors santé. Enfin, les facteurs de confusion possibles, comme l'âge, le sexe, l'ethnie, le revenu annuel, le nombre d'heures hebdomadaires travaillées, le nombre d'années depuis le mariage et le lieu de résidence ont été pris en compte. Les résultats précisaient le taux de divorce global et au cours de l'année précédente.
L'analyse montre que,
· la prévalence du divorce chez les médecins s'élève à 24,3%
· dentistes : 25,2%
· pharmaciens : 22,9%
· infirmières : 33,0%
· cadres de santé : 30,9%
· avocats : 26,9%
· Autres professionnels non-santé : 35,0%
2 conclusions :
– Les médecins ont un risque de divorce inférieur à la prévalence en population générale,
– les infirmières apparaissent comme la profession de santé la plus à risque de divorce.
Le taux de divorce est plus élevé chez les femmes médecins : Ainsi, la prévalence de divorce chez les femmes (OR : 1,51) est plus élevée, non seulement par rapport à leurs homologues masculins mais également aux taux observés dans les autres catégories professionnelles.
Cet effet, expliquent les auteurs est attribuable à l'impact du nombre d'heures travaillées plus important chez les femmes.
Enfin, l'étude n'apporte malheureusement pas de résultats en fonction des spécialités ou types d'exercice.
Derrière chaque statistique, une histoire humaine: Le Dr Amanda Howe, professeur en Soins primaires à l'University of East Anglia (UK), commente ces résultats et souligne qu'alors que derrière ces chiffres, ce sont des rêves brisés, des dommages collatéraux y compris sur les enfants, qu'un mariage sur 4 chez les médecins et un sur 3 chez les infirmières se termine par un divorce révèle la pression que subissent ces deux professions pourtant a priori bien entourées.
L'auteur met l'accent sur les défis psychologiques de ces deux exercices, soulignant que la médecine doit répondre à une forte demande, son exercice est à responsabilité élevée et parfois à risques, et que sa pratique a déjà été associée, par de précédentes études à des taux plus élevés de problèmes de santé mentale et de toxicomanie que d'autres activités professionnelles. La constatation que les femmes médecins ont des taux plus élevés de divorce avec de longues heures de travail vient documenter, plus largement, la difficulté d'atteindre l'équilibre émotionnel entre responsabilités personnelles et professionnelles et, ici plus particulièrement, entre soignant à l'hôpital et soignant à la maison…
Sources: BMJ 2015;350:h791 19 February 2015 Doctors and divorce
BMJ2015;350:h706 18 February 2015 Divorce among physicians and other healthcare professionals in the United States: analysis of census survey data